Prépa Kawa 750 GPZ 83 pour la Vitesse en Moto Ancienne

Quand on se lance dans ce genre de bitza avec une fourche de ci, une roue de là et des étriers venus d’ailleurs, il y a deux étapes auxquelles on n’échappe pas : les frettes de disques et les pattes d’étriers.
Tout commence par un travail d’études, mené ici dans un bureau du type open space. La suite logicielle utilisée pour produire les dessins des pièces est la bien connue de certains ici même : Alamano. Elle se combine avec un remarquable système de métrologie 3D, extension à laquelle a sûrement souscrit notre camarade jml. Aperçu :

A gauche, la roue et les disques à mesurer. Au centre, le rectangle blanc est l’interface graphique, entourée de ses outils de palette graphique. En rose au-dessus, le cœur du puissant calculateur, posé au milieu des palpeurs du système de métrologie. Un autre calculateur plus puissant encore est partagé avec les autres services et utilisé de temps à autre pour les calculs les plus évolués (pour les érudits, ceux du type racine carrée ou cosinus).

Pour dimensionner la pièce, différents disques ont été mesurés. Depuis le plus ancien (250 TZ de 92), tous font 5 mm d’épaisseur et sont ajourés de partout. Le plus minimaliste est celui-ci, appartenant à une ZX10R 2011.


Pour ne pas connaître une très grande solitude dans un freinage genre Adélaïde à Magny Cours, les frettes de la GPZ feront prudemment 7 mm d’épaisseur. Elles supporteront finalement des disques flottants neufs, prévus pour une 500 CB.
Les dessins, après quelques calculs abordés sous le bon angle et parfois en prenant la tangente (merci à ma prof’ de maths à domicile pour son aide dans certaines formules oubliées et ses brillantes démonstrations) :



Les bruts en alu 7022, 3,6 kg chacun à ce stade :


Tentative de carottage pour l’alésage. Technique abandonnée pour la deuxième pièce. Les copeaux ne s’évacuent pas, il faut ressortir le trépan tous les 4/5 mm.


Forêt plus classique sur la seconde pièce.


La pièce est prise par l’extérieur, usinages d’une face et d’une portion de diamètre extérieur.


Alésage du centre


Je la prends, je la retourne et je la cale, je lui enlève son voile et je l’empêche de sauter. A renouveler à chaque reprise de pièce dans le mandrin. La pièce est saisie par le centre dans le cas présent.


Fin du diamètre extérieur, puis de l’autre face, tout est parallèle et perpendiculaire dans les 2/100 mm.


Le niveau des copeaux commence à monter.


Même forme globale que les bruts du départ, mais en plus beau et surtout plus aux cotes.


Réalisation de la face qui recevra les vis de fixation au moyeu.


Tournage de la pente côté fourche.


Résultat intermédiaire.


Réalisation de l’épaulement qui supportera le disque.


Ebauche en forme d’escalier de la pente côté roue.


Finition ensuite de cette même pente. Fin de la partie tournage. Chaque pièce pèse environ 570 g à ce stade.


Perçage des trous de vis (moins 6 grammes). La pièce est du même diamètre que le plateau tournant, d’où cette forêt de brides « contournantes ». Un centreur tourné spécialement et placé entre le trou du plateau et l’alésage de la pièce garantit la concentricité.


Avec le même montage, fraisage de lumières en arrondi qui outre l’allègement (- 16 g) permettront une fixation sur le plateau.


Après usinage des logements pour les bobines qui donnent la caractéristique de flottants aux disques (– 15 g).


Les pièces seraient fonctionnelles telles que. Il reste de la matière en trop et la poubelle à copeaux a été vidée entre temps. Gaz ! Là, ça va barder. Deux étapes du processus.



C’est fini, les derniers allègements ont permis de gagner 245 g (535 g avant exécution). La pièce avoue au final 0,00029 tonne.


Montage du disque avec les bobines, circlips et diverses rondelles, avant pose sur la roue.

Sacré boulot  

Impressionnant !!!   
Avoir un tour ou une fraiseuse , c'est bien . Savoir s'en servir comme toi . Chapeau

Je suis complètement soufflé.
Tant par la qualité du travail que par toute cette ingéniosité !!  

Il faut reconnaître que posséder un tel outillage dans son garage/atelier n'est pas donné à tout le monde, mais comme le souligne cacajou, encore faut-il savoir s'en servir !!

En tout cas chapeau bas, et vivement la suite.

Bravo Jérome, effectivement j'ai le meme process que toi (c'est comme ça qu'on dit maintenant).   
Par contre c'est autorisé les flottants en VMA   ??? Si oui c'est dommage j'avais trouvé une astuce pour détourner le règlement à base de disques de BM K100 je vais vous montrer cela prochainement  

JML a écrit:

.../... j'avais trouvé une astuce pour détourner le règlement .../...

Bravo, bel esprit sportif ! Sois heureux que je rebondisse sur ton propos qui ne mériterait que mon souverain mépris. Dans le règlement 2013, j'ai compris que c'était bon. Comme toi, j'aurais parié non avant d'aller vérifier. Si je "m'a" gourré ou que ça change, je remplacerai le système "de flottaison" par un truc pour les rendre fixes.

Quand je lis des sujets comme ça, les bras m'en tombent  

Ce qui n'est guère facile pour taper sur le clavier  

Les disques flottant c'est mieux sous la pluie ?

Frat Mos a écrit:

Quand je lis des sujets comme ça, les bras m'en tombent  

Ce qui n'est guère facile pour taper sur le clavier  

Moi, à ta place, j'aurai choisi la vénuse de milo comme avatar plutot que la statue de la liberté...

  

 
super taf

Globalement, Miss GPZ souffre d’embonpoint. On n’en est pas à l’obésité, mais Mémère a eu des parents qui l’ont nourrie à coups de matériaux épais. Point de régime Dukon pour elle, mais un séjour prolongé dans la clinique du Docteur Mac PepR est en cours. Aujourd’hui, elle a perdu environ 1,5 kg, son bras oscillant d’origine laissant place à un élément de 250 KR1.


Petit problème, il y a comme du jeu latéral.


En détail


Le travail commence par le traitement de l’axe d’origine qui est à la fois trop petit et trop gros.
Trop petit parce que sur une moto moderne, les axes sont tubulaires et de fort diamètre, pour plus de rigidité. Ca oblige à reprendre les paliers sur le cadre et là, pas simple, même en se contentant d’augmenter d’un ou deux mm. On verra plus tard.
Trop gros pour passer dans le logement du bras de KR1. Il a fallu augmenter d'un mm l'intérieur de l’entretoise qui sert de bague intérieure aux roulements.
Tant que le tour est en route, l’axe d’origine GPZ subit quelques interventions pour lui réduire en particulier le tour de taille.


Une barre de Forthal fournit presque sans intervention les deux entretoises épaulées.


Qui sont ensuite mises en place.


Vue en détail


C’est tout pour aujourd’hui. Des choses plus longues se profilent.

Tu perd pas en largeur de pneu ?

Tu sais que dans cette affaire, je me contente de copier. Ce sera pneu de 150, sur jante de 4 pouces. Jean-Luc n'avait que 3,5 pouces pour la saison 2013. En clair : il en a une plus petite que moi ! Cependant, il va se greffer un demi pouce de plus pour 2014.

Encore beaucoup de copeaux sur cette partie du projet. Avec la fin de ce gros morceau, le « train avant » est allé … de l’avant.
Disque en place, un des bon vieux étriers Lockheed est présenté. Si je ne les avais pas eus à ma disposition, je pense que j’aurais opté pour autre chose, car leur configuration n’est pas terrible. Au moins auront-ils la touche très « vintage » qui sied si bien à une moto de VMA. Signalons au passage que le règlement technique n’autorise que deux pistons maximum par étrier.
Ca commence mal. Le décalage entre fixations de l’étrier et oeillets de fourche est dans le mauvais sens. La patte de liaison devra adopter une forme d’escalier.


Relevé des cotes pour la vue de profil. L’important : les trous, matérialisés par des piges. Les règles et équerres permettent de mesurer les distances selon deux axes. Pour le bon résultat, il ne faut pas oublier de retirer ou d’ajouter un demi diamètre par ci, une épaisseur de règle par là.


Une fois les cotes consignées sur un dessin, un gabarit en carton permet de vérifier qu’il n’y a pas une grosse erreur.


Au départ, c’est ce bloc de Forthal qui devait servir de brut (on prend ce qu’on trouve). Il faut « simplement » le découper en tranches.


Roger Ruiz dispose d’une scie à ruban, bien pratique pour ébaucher ce genre de pièce. Après trois secondes de négociation, on tombe d’accord. Il me fournit le même métal dans l’épaisseur qui convient, je découpe mes bruts avec son matériel et il garde le gros bloc de Forthal. Pour ceux qui ne connaîtraient pas ce personnage, l’homme est vainqueur du Bol d’or 1972, court toujours en endurance moto ancienne et est un vrai mécanicien passionné. Je ressors de chez lui avec ces deux ébauches.


On commence par caler les pièces au pif dans l’étau et usiner deux première surfaces.


Les surfaces désignées par les flèches sont parallèles entre elles et peuvent servir de références pour la suite.


Exécution des perçages. Sur cette vue, on voit que les bruts sont un peu justes ou que les trous auraient gagné à être déplacés de quelques mm.


A partir de ce moment, ce sont les trous qui serviront de référence. Retour des piges du début pour positionnement dans l’étau et usinage d’une autre face.


La machine travaille, l’homme pense.


Les parties rectilignes sont terminées.


Mise en place du plateau tournant pour exécuter les nombreux arrondis.


La forme extérieure est presque terminée.


Usinage des marches d’escalier.


Travail d’allègement en cours.


Allègements terminés. Les copeaux partis représentent 30 % du poids de la pièce. Au temps passé, ça fait cher le gramme (moins que la coke, mes tarifs sont raisonnables).


Partie fraisage terminée.


Taraudages.


Pose immédiate de filets rapportés pour renforcer les taraudages (pas fin de 10X1,25).


Vérification finale, tout va bien. Ouf !

Suite du travail sur l’avant, avec la réalisation de pièces pas forcément stupides pour diriger la future bête de course : les demi guidons. Comme c’est l’un des premiers éléments qui dégustent en cas de violent contact avec le sol, un jeu de rechange est fabriqué directement. De plus, la conception retenue permet le cas échéant de ne changer que le tube, démontable.
Une fois fini, ça se présente comme ça.

Le tube en haut à droite est interchangeable seul et taillé dans une barre qui vient d’Angleterre. C’est de l’alu type 6082 qui fait la très exacte cote de 7/8 de pouce, soit environ 22,2 mm. L’épaisseur relève d’une échelle à la con Britannique et est d’environ 3 mm.

Les pièces des bracelets sont elles issues de barreaux de 5083 (AG5) qui a le mérite d’être soudable facilement. Les voici à la sortie des opérations de tournage.

En haut, le support du guidon en lui-même, la pièce qui pincera le bracelet et le bracelet tout en bas.

Le support de guidon passe à la fraiseuse pour le grugeage / gueule de loup / embrèvement (rayer la mention inutile) qui donnera l’inclinaison, dans le cas présent 10°. La pièce qui recevra la vis de serrage suit le même traitement, mais sans inclinaison.


On passe à la partie soudure. Pour tout tenir en place, c’est ce montage qui sera utilisé. Le bloc d’acier à droite au fond de l’étau a été usiné avec la pente de 10°. Un bloc est placé au centre du bracelet pour éviter la déformation lors de la soudure.


Les morceaux à assembler dans le montage. Le guidon en acier prévient la déformation du support de tube et repose sur le plan incliné à 10° de la photo précédente.


Pointage dessus / dessous puis soudure d’un côté.


Pointage du système de serrage, là c’est la vis qui fait anti-déformation.


Réalisation de la fente d’élasticité qui n’est pas au centre du dispositif de serrage. La partie taraudée est deux fois plus longue que la partie lisse pour pouvoir serrer correctement sans arracher le taraudage.


Malgré les précautions prises, l’alésage porte guidon demande une petite reprise au tour après soudure.


Début de la fabrication des vis de serrage (en alu Forthal type 7075), ici à la sortie du tour. Le diamètre intérieur du tube est d’environ 15,4 / 15,5 (combien est-il en pouces ?). Je dispose d’un taraud de 16 X 1,00 qui ne fera pas mordre beaucoup les filets. Pour compenser la vis est longue : 3 fois le diamètre environ.


Réalisation des six pans des vis.


Etat intermédiaire.


Filetage des vis.


Assemblage final. La vis accepte un serrage de 30 DaN.m qui devrait logiquement empêcher le guidon de jouer les filles de l’air. De plus, vu la longueur de la vis, il lui faudra quelques km avant qu’elle abandonne complètement le navire.


Montage sur la fourche. Au passage la vis au centre du té supérieur en acier jusqu’à lors a été refaite en Forthal. C’est bizarre, mais je trouve qu’avec ses guidons, elle fait tout de suite plus moto.

Non seulement c'est du très beau boulot , mais en plus c'est très instructif.
Surtout pour les pinces comme moi dont l'apprentissage de l'usinage s'est limité à réduire un bloc d'acier à l'étau limeur.
Vivement la suite.
 

J'aime bien regarder ce boulot, c'est une des cordes qui manque à ma guitare et surtout il s'amuse et c'est très important.

 Très beau travail , merci de nous faire partager (en plus) les astuces que tu imagines à chaque étape de tes réalisations, un vrai régal   

Ouais, c'est vraiment super  

Quel régal de parcourir ce post.
ça fait rêver....

J'ai un ancien tour dit d'horloger sous l'établi. Je ne l'ai encore jamais mis en service depuis que je l'ai récupéré il y a une quinzaine d'années,
mais de voir le travail que tu fais me donne l'envie de l'installer et de commencer à bricoler avec...

Je sais pas pour faire quoi, mais.....  

Des maquettes de motos !

Des jetons de caddy.   

Tu sais Jean Luc, un tour est probablement la machine la plus indispensable quand on bricole un tantinet.
J'ai découvert ça avec ma première vraie moto, au sens de l'époque c'est-à-dire de plus de 125 cm3. Sur cette 250 RD de 73, les clignotants sont montés sur une tige filetée, percée en son centre parce que le fil passe par là. Quand tu veux faire la pièce de remplacement, tu coupes dans une barre de tige filetée et là ... Va percer droit et dans l'axe avec une simple chignole   
Si tu mets ton tour en service, tu trouveras très rapidement des utilisations possibles.

Je n'ai pas la compétence nécessaire pour juger de la qualité de ton boulot, même si je vois bien que c'est du très beau travail, par contre, je me rends bien compte de ton talent à présenter ce que tu fais et à intéresser tes spectateurs : quand tu racontes, ça donne vraiment envie de faire pareil.

Merci pour ces moments où on a l'illusion qu'on pourrait y arriver.

O.